Introduction :
Le Tembé est composé de motifs géométriques qui s'entrelacent, le compas et la pointe sèche sont utilisés pour tracer les motifs, qui sont ensuite gravés au couteau ou à la hache. A l’origine ces motifs ont été inventés par des esclaves révoltés (les « Nègres marrons » ou « Nèg Marrons » le terme « marron » venant de l’Espagnol cimarron qui signifie « sauvage » ou « retourné à l’état sauvage ») ayant fui les propriétés de Guyane Française et Hollandaise (Suriname) durant le XVIIème siècle.
Ces formes étaient utilisées comme « code secret » par ces populations pour diffuser des informations nécessaires à leur survie en forêt telles que l’emplacement des campements, les lieux de chasse et surtout comment échapper aux chasses à l’homme organisées par les esclavagistes.
Les Origines :
Au XVIIème siècle l’esclavage est à son apogée les nations européennes notamment Française et Hollandaise en Guyane déportent environ 13 millions d’individus vers l’Amérique, les conditions de vie abominables conduisent aux premières insurrections et le « marronage » (fuite en forêt) est de plus en plus fréquent.
Les groupes de marrons des forêts mènent la vie dure à leurs anciens tortionnaires et installent un climat d’insécurité permanent attaquant régulièrement les plantations. De véritables chasses à l’homme sont alors organisées par les propriétaires terriens et la forêt offre aux marrons les ressources (eau, nourriture et bois) et la protection nécessaire pour résister. Les marrons ont rapidement besoin de communiquer sans que les chasseurs d’hommes ne puissent comprendre leurs messages ils développent alors un système de dessins gravés, à base d'entrelacs, qui devient leur « code secret » et deviendra un véritable langage écrit pour ces populations. C’est la naissance de l’art Tembé.
Les Tribus Guyanaises :
Dans la seconde moitié du XVIIIème siècle le pouvoir Hollandais est contraint de signer des accords de paix avec les tribus de fugitifs en 1760 un traité est signé avec les Saramakas et les Djukas et en 1783 avec Les Alukus (ou Bonis). Les esclaves fugitifs purent s’organiser en microsociétés ouvertement reconnues et bénéficiant du libre usage de leurs territoires. Au total six tribus sont établies dans les forêts Surinamiennes et Françaises de Guyane : Les Saramakas, Les Bonis (Alukus), les Paramakas, les Hatawaïs, les Kwinti-Matawaïs, les Aucaners (ou Youkas, ou N’Djuka). Leurs descendants vivent encore aujourd’hui en Guyane et sont fiers de la façon dont leurs ancêtres ont conquis leur liberté dans les forêts surinamiennes.
Ces tribus regroupées de nos jours sous l’appellation « Bushinengés » (du sranan : Bushi Nenge, dérivé néerlandais : Bos Negers, et de l'anglais : Bush Negroes, littéralement « nègres de brousse » en français) développèrent leur propre culture basée notamment sur l’art Tembé (art de sculpter), véritable langage écrit étant donné la multitude des symboles sculptés et/ou peints dans le bois.
Les Symboles :
Les motifs Tembés ont une signification, ce sont des formes géométriques qui s’entrelacent sur des objets décorés offerts lors de grandes occasions. Lors d'un mariage traditionnel, les hommes offrent un Tembé à leur épouse qui symbolise un engagement : la fidélité, la protection, l'envie de fonder une famille nombreuse, etc. Les pirogues et les pagaies sont également décorées pour assurer succès et richesse à ceux qui naviguent sur le fleuve.
Le Tembé est un art quotidien proche de l’artisanat et il orne des peignes, des bancs, des pagaies.
Les anciens « Tembémen » utilisent les couleurs dans un but essentiellement esthétique. Cependant, les artistes les plus jeunes, motivés par l'intérêt touristique et économique, ont accordé des valeurs à chaque couleur, comme dans un code : le noir pour la Terre, le rouge pour l'homme, le blanc pour la femme et la beauté, le jaune pour la richesse, le vert pour la forêt.
L’artiste militant Guyanais Lamoraille donnait le sens suivant au Tembé :
« plus qu’un art, le tembé est l’expression des mots issus du marronnage : solidarité, respect, partage… Tout à la fois art de traditions et art d’avant-garde, il rétablit la notion d’ordre et d’équilibre car il a pour but de célébrer l’amour, l’amitié, la beauté… Mais cet art est un art du double sens où l’essentiel doit rester caché et découvert peu à peu par ceux qui le pratiquent. »
UMLA
Sources :
- Africultures- « Les symboles de l’art Tembé » article de Février 1999.
- ekladata.com – Lart Tembé.
- Association LiBi Na Wan – Histoire
Photos : MGD News, Temoins de l outre mer.